N: Qu'est-ce que...? -2
Il avançait prudemment dans le couloir obscur, sa main frôlant le mur froid et rugueux. Plongé dans le noir et le silence, il s’appuyait uniquement sur son sens du toucher pour se déplacer. Ses sensations était très fortes, il ressentait toutes les aspérités de son mur guide, et percevait limpidement l’air autour de lui. C’était une atmosphère lourde, presque liquide. Liquide, c’était exactement ça. Comme s’il marchait sous l’eau, et voyait ses propres déplacements freinés. Mais étrangement, cela le poussait aussi en avant, guidant ses pas tout autant qu’il les entravait. Il n’entendait pas le bruit de ses chaussures sur le sol, aucun son ne perturbait cet environnement ouaté. Immergé dans le silence, son corps se mouvant avec automatisme à travers le corridor, son esprit seul fendait l’obscurité du lieu pour imaginer où cela le mènerait. Qu’y aurait-il au bout du chemin ? Une porte sans aucun doute. Oui, une porte, il en était certain. Et derrière cette porte ? Un changement. Un changement radical. C’est comme dans ces histoires, où la porte représente un choix et un avenir. Une fois franchie, plus rien n’est pareil. Et on ne peut pas revenir en arrière, on ne peut pas ne pas passer la porte. On ne peut pas souhaiter ne rien changer. Son cœur cognait sous l'impulsion de ses émotions, sa propre vie reflétait les envies de son âme, et battait au rythme de l’impatience. Il avait oublié l’ascenseur baigné d’une lumière douce. Oublié sa peur, ses doutes, ses inquiétudes. Là, dans ce monde fait d’une douce froideur et d’un noir apaisant, il était un homme qui avançait au seul cadencement de ses certitudes. Un homme qui savait exactement qui il était, où il était, où il allait. Pour la première fois de sa vie, et la dernière, il connaissait la véritable paix de l’âme.
Mais l’éther autour de lui se faisait plus pressant, il touchait au but. Sans même s’en rendre compte, elle était là, la porte. Il n’avait aucune question à se poser, c’était pour ça qu’il était là. Il poussa la porte. Et alors que la lumière du soleil inondait son visage, il se jeta la tête la première à l’extérieur.